Incendie du mas de la Fage à St-Martin-de-Boubaux


Le mas de la Fage, appartenant au nouveau converti David Bonnal, réfugié à Alès, a été brûlé par les soldats du maréchal Julien au cours du grand brûlement des Cévennes, le 1er ou le 2 décembre 1703. Cette photo montre l'état du mas de la Fage Haute entre les deux guerres mondiales (il avait été reconstruit après 1705). Actuellement, seules subsistent des ruines envahies par la végétation.

Malgré la redondance de certains paragraphes, nous publions ici l'intégralité du dossier.


AD34 C258
Nous Vincent Brès maire perpétuel de la paroisse de Lamelouse et François Verdier bourgeois dudit lieu experts .... nommés d'office par mr Antoine de Ribes avocat au parlement et subdélégué par monseigneur de Basville intendant de Languedoc par son appointement du vingt-quatre de ce mois pour procéder à la vérification et estimation des dommages soufferts par David Bonnail marchand du lieu de la Fage paroisse de St Martin de Boubaux diocèse dudit Mende à ses métairies situées audit lieu de la Fage, brûlées par ordre de mr de Julien lieutenant général commandant ci-devant au pays des Cévennes, lors dud brulement général fait audit pays des Cévennes et Gévaudan pour oter tous refuges aux scélérats et troupes rebelles à sa Majesté, ensemble à l'estimation des meubles et cabaux qui étaient à ladite métairie brûlés ou pillés, et autres dommages soufferts à raison de
Après avoir porté serment par devant ledit sieur de Ribes en la forme ordinaire, nous sommes tous portés audit lieu de la Fage, accompagnés d'Antoine Laval, François Verdier dud St Martin et d'une escorte à nous donnée pour la sureté de nos personnes, avons commencé par l'entrée de la métairie appartenant aud Bonnal appelée la Fage, le tout vu, vérifié et examiné exactement avons levé y avoir cinquante-trois canes sept pans de couvert brulé et dix membres que nous avons estimé quatorze livres la cane, considéré que les membres étaient couverts tant de bois que de pierre qui coutent beaucoup pour les faire tirer, et pour apporter par rapport à la longueur par rapport à l'éloignement les chemins étant fort mauvais, et encore de ce qu'il faut de grosses poutres et beaucoup de bois fort pour les tenir, à cause que ces sortes de couvert sont extrêmement pesants, se montant la somme de sept cents cinquante trois livres quinze sols, plus huitante trois canes cinq pans (de) planchiers huit cent trente six livres cinq sols, lesquels planchers ont été entièrement brûlés, plus trente sept portes et fenêtres brûlées qu'avons estimé trois livres pièce, l'une portant l'autre que montent deux cent vingt deux livres, plus trois cheminées entièrement brulées que avons estimé la somme de soixante livres, plus seize canes de murailles brûlées, savoir huit canes pierre sèche qu'avons estimé vingt quatre livres, et les huit canes calcinées à six livres la cane pour être les achaux éloignées montent quarante huit livres, plus nous étant transporté à l'autre métairie dud sieur Bonnail appelé le mas dauberguat par led la Fage une maison à deux membres contenant quatre canes du couvert à quatorze livres la cane montent cinquante six livres pour le plancher servant de claye à six livres la cane montant vint quatre livres, plus nous étant transportés à une métairie appelée les abeillères aussi proche led mas de la Fage, où il y a deux membres lun à trois étages et l'autre à deux y ayant découvert brulés, sept canes deux pans que avons estimé pareille somme de quatorze livres la cane monte nonante cinq livres quinze sols, pour les planches la somme de huitante cinq livres dix sols, y ayant quatre portes et trois fenêtres qu'avons estimé douze livres et avec une cheminée ruinée que avons estimé dix neuf livres et à l'égard des effets mentionnés dans la susd exposition, attendu que nous n'avons pas eu connaissance d'iceux, avons sur l'affirmation par serment du sieur Bonnail et de Antoine Laval son rentier, avons estimé iceux par rapport à leur qualité, comme s'ensuit premièrement trente ruches à miel renversées et pillées jugeant etre de valeur de trois livres pièce, nonante livres, à la cuisine proche le portal ont dit y avoir pris une paire landiers pesant huitante livres qu'avons estimé seize livres, une broche une livre, un garderobe bois noyer à deux portes avec ses ferrements douze livres, un grand banc alentour de la cheminée qu'avons estimé six livres, un bassinoir avons estimé deux livres dix sols, une chaise de commodité garnie qu'avons estimé six livres, six autres chaises de saule garnies de paille qu'avons estimé trois livres, un bois de lit noyer qu'avons estimé six livres, une marfegue (paillasse) toile grise, deux livres et une couverte le tout dix sept livres, un cabinet bois noyer fermé à clef de valeur de dix livres, à coté où était le grenier à foin led sieur Bonnal et Laval ayant dit y avoir huitante quintals que avons estimé huitante livres, à la chambre sur le portal y avait pour les valets un lit bois noyer, une marfegue paille et deux linceuls une couverte qu'ont estimé huit livres, au second membre à la plus basse estage y avait six brebis et deux chèvres, qu'avons estimé vingt livres, un lit pour le berger trois livres, au second membre qui servait de cuisine, y avait un garderobe fermé à clef pour tenir les viandes, avons estimé dix livres, deux mets à pétrir que avons estimé dix livres, un placard que avons estimé quatre livres, une table bois noyer qu'avons estimé six livres, six chaises garnies de paille trois livres, deux pots étain ouvré et vaisselle cinq livres, un petit paire landiers fers pesant douze livres que avons estimé deux livres huit sols, un poix romaine tire trois cent vingt livres qu'avons estimé douze livres, un grand banc alentour de la cheminée qu'on estime six livres, à l'autre département du soleil levant à la chambre joignant les précédents y avait le bois de deux lits noyers que avons estimé douze livres, six chaises de bois noyer que avons estimé six livres, au dessus de ladite chambre y avait deux caisses sapin fermées à clefs que avons estimé huit livres, le cabinet à coté de la chambre pour saler les pourceaux de huit pans de long six de largeur avec une porte fermée à clef que avons estimé dix livres, six aissades pour fossoyer la terre que avons estimé sept livres, cinq piques pour rompre les rochers que avons estimé six livres, deux haches six faucilles que avons estimé six livres, trois pilles à tenir huile tenant environ quatre cartal chacune que avons estimé neuf livres; au membre le joignant ou était la cave que led sieur Bonnal et Laval nous ont dit y avoir une cuve coulant quatre vaisseaux que avons estimé trente livres, un grenier bois noyer tenant douze salmées que avons estimé la somme de vint livres, deux coffres bois noyer ou cerisier fermant à clef que avons estimé douze livres, sept tonneaux de sept barrals chacun que avons estimé vingt une livres, trois teusairolles six livres, à la seconde estage qui servait à faire les vers à soie un grand garderobe fermé à clef que avons estimé vingt livres, trois plats que avons estimé six livres; au membre dessus l'écurie y avait de paille environ trente quintal que avons estimé quinze livres, revenant toutes les susd sommes des susd estimations jointes à la somme de deux mil sept cens septante quatre livres et trois sols dans lesquelles estimations n'avons pas compris les dommages injustes que led sieur Bonnal a souffert et souffre pour n'avoir pas pu jouir desd métairies à cause de cet incendie, ce qu'il ne pourra faire que lesd maisons ne soient remises, en tout ce dessus avons procédé le plus justement qui nous a été possible, fait aud mas de la Fage le vingt et unième novembre mil sept cens quatre

Monseigneur de la Moignon, chevalier conseiller d'estat ordinaire, intendant en Languedoc
Supplie humblement Sr david Bonnal, marchand du lieu de St Martin de Boubaux, habitant depuis dix-huit mois en la ville d'Alès, et vous représente que s'étant toujours distingué dans le service et le zèle de la religion, il aurait été obligé pour garantir sa vie de la fureur des rebelles de se retirer audit Alès avec toute son entière famille, en haine de quoi lesdits scélérats révoltés lui pillèrent et brûlèrent presque tout ce qu'il avait dans ladite paroisse de St Martin de Boubaux. Cependant, quoique distingué du nombre des Nouveaux Convertis par plusieurs décharges que vous lui avez fait la grâce de lui accorder sur plusieurs certificats de fidélité qui vous ont paru, on n'a pas resté que de le traiter sans distinction avec beaucoup de rigueur dans l'exécution des ordres de Sa Majesté et de lui faire brûler ce qui lui restait encore après le brûlement des rebelles. Ce qui fait qu'il se trouve aujourd'hui hors d'état de pouvoir faire subsister sa famille et dépourvu de beaucoup de denrées qui lui ont été brûlées avec ses dites maisons et effets, en telle sorte qu'à l'avenir connaissant la fidélité du suppliant vous lui ferez la grâce de l'indemniser de ce qui peut lui avoir été consumé par le feu ou enlevé par les attroupés. C'est pourquoi il a recours à vous, à ce qu'il vous plaise Monseigneur permettre au suppliant de faire procéder à une juste estimation de toutes ses maisons et effets et denrées qui lui ont été brûlées et enlevées et faire justice et le suppliant priera Dieu pour votre santé et prospérité.

Nous ordonnons que par le premier gradué requis que nous commettons à cet effet, il procède à la vérification du dommage en question, et que par experts royaux, ou en défaut qui seront par lui pris d'office il en sera fait estimation, pour le tout à nous pour être ordonné ce que de raison, fait à Montpelier le XVI janvier 1704
Delamoignon

L'an mil sept cent quatre et le vingt quatre jour du mois de novembre avant midi par moi Pierre Martin huissier et conseiller d'Alès y habitant soussigne à la requête du sieur David Bonnal marchand de la paroisse de St Martin, réfugié depuis deux ans en ladite ville d'Alès, j'ai donné assignation à Sr Vincent Brès maire perpétuel de la paroisse de Lamelouze et à François Verdier bourgeois dudit lieu, parlant à chacun d'eux trouvés en leur domicile audit Alès pour comparaitre ce jour d'hui heure de midi dans la maison de Mr Antoine de Ribes avocat en parlement, commissaire subdélégué de Mr de basville Intendant de la province du Languedoc pour prêter serment et être reçus et sermentés en la forme ordinaire pour procéder à la vérification des maisons, meubles, cabaux brûllés ou pillés audit sieur Bonnal en la paroisse de st Martin de Boubeaux, et leur ai baillé copie et déclaré que le sr Bonnal fera ses réquezions,
En foi de ce Martin

Verbail
L'an mil sept cens quatre et du lundi vingt deuxième jour du mois de novembre dans la ville d'Alès, maison et par devant nous Antoine de Ribes docteur et avocat au Parlement, commissaire député par monseigneur le comte de Basville conseiller d'estat ordinaire, intendant en Languedoc, heure de huit du matin
A comparu sieur David Bonnal marchand de la paroisse de St Martin de Boubaux, réfugié dans cette ville depuis environ deux ans, lequel nous a exposé que monsieur de Julien lieutenant général des armées du Roy aurait fait brûler le 26e octobre de l'année dernière toutes les maisons et métairies qui sont dans la paroisse dudit St Martin de Boubaux, afin que lesdites maisons ne servissent pas d'asile ni retraite aux rebelles. Cependant comme il n'est pas juste que ledit sieur Bonnal ne fut indemnisé du dommage qu'il a souffert dans cette occasion, tant à l'égard du brûlement de ses métairies situées au lieu de la Fage dépendant dudit St Martin de Boubaux, qu'à l'égard des meubles et effets qui lui furent aussi brûlés ou pillés, consistant en trente ruches à miel, une paire landiers, une broche, un garde-robe bois noyer, un grand banc alentour d'une cheminée, un bassinoir, une chaise de commodité, six chaises bois noyer, six autres chaises de saule garnies de paille, un bois de lit noyer, une paillasse, un autre cabinet bois noyer, quatre vingt quintaux de foin, autre lit bois noyer, autre paillasse, deux linceuls, une couverte, un lit pour le berger, un garderobe, un placard, une table bois noyer, autres six chaises garnies de paille, deux pots étain ouvré, un petit paire landiers fers, , un autre grand banc alentour d'une autre cheminée, autres deux bois de lit, six autres chaises bois noyer avait deux caisses sapin fermant à clefs, autre cabinet servant de saloir pour les pourceaux, six aissades pour fossoye, cinq picons pour rompre les rochers, deux haches, six faucilles, trois pilles à tenir huile, une cuve coulant quatre vaisseaux, un grenier bois noyer tenant douze salmées, deux coffres bois noyer ou cerisier fermant à clef, sept tonneaux tenant sept barrals chacun, trois teusairolles, un grand garderobe fermant à clef, trois plats d'étain et trente quintaux de paille, lesdits objets ou meubles étant en différentes chambres de sesdites métairies, et comme il est juste que l'exposant soit indemnisé de la perte et dommage qu'il souffre à cause de la perte desdits brûlement, enlèvement et autres ravages, il aurait présenté requeste devant mondit seigneur l'intendant à ce qu'il lui plut lui permettre la vérification et estimation d'iceux, sur laquelle mondit seigneur l'intendant aurait par son ordonnance du seizième janvier dernier commis le premier docteur gradué pour être procédé par experts royaux ou ci dessous pris par lui d'office, à la vérification et estimation dudit brûlement et dommages en question, et parce que nous sommes de la qualité requise, il nous présente ladite commission requis la recevoir suivant icelle, attendu que dans la paroisse de St Martin … avons nommé deux experts d'office pour procéder à la vérification et estimation dudit brûlement et enlèvement à lui fait tant à sa maison qu'en denrées et effets contenus en sa susdite exposition qu'il offre affirmer véritable, nommés d'office deux experts.
Nous conseiller, avons reçu notre commission avec honneur et révérence et en procédant au fait d'icelle, après avoir fait préter serment audit sieur Bonnal la main mise sur les saints évangiles, moyennant lequel il a assuré le contenu en la susdite exposition être véritable, avons nommé d'office en défaut d'experts royaux, Sr Vincent Brès maire en la paroisse de Lamelouze, et François Verdier dudit lieu pour procéder à la vérification et estimation du … des métairies dudit sieur Bonnail et des effets et cabaux énoncés en la susdite exposition, et à ces fins ordonné qu'ils seront assignés par devant nous pour … (illisible)
Du lundi vingt quatre jour du mois de novembre an susdit par devant nous conseiller heure de deux après midi
De Ribes, conseiller

A comparu derechef ledit sieur Bonnal, lequel nous a dit qu'en conséquence de l'appointement (?) par nous rendu ce jour d'hui aurait fait assigner lesdits sieur Brès et Verdier experts par nous pris d'office pour être par nous sermentés comme apert par l'exploit du susdit jour duement contrôlé requérant pour cet effet, et attendu qu'ils ont ici présents de leur reception pour experts sur les évangiles prêté serment
Nous commissaire avons reçu pour experts lesdits sieur Brès et Verdier, à iceux fait prester serment la main mise sur les saints évangiles de bien et fidèlement procéder au fait de leur commission, ce qu'ils nous ont promis de faire, et du tout en dresser leur relation pour nous la remettre
De Ribes, commissaire

Du Vingt sizième jour du mois de novembre en susdite maison et par devant nous commissaire heure de deux après midi
Ont comparu lesdits sieurs Brès et Verdier qui nous ont dit qu'en conséquence de l'appointement et commission à eux expédiée, ont procédé à l'estimation a eux commise, dont ils ont dressé leur relation ce jour d'hui qu'ils remettent, requérant leur en octroyer acte pour servir et valoir ainsi qu'il appartiendra,
Nous commissaire subdélégué, ayant égard à la réquisition des sieurs Brès et Verdier, avons octroyé acte de la remise de leur dite relation que nous avons joint à notre verbail, et avons renvoyé notre susdite commission par devant mon seigneur l'intendant pour en être par lui ordonné ce qu'il appartiendra
De Ribes commissaire

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