Perquisition chez Joiny

Document inédit retrouvé aux Archives départementales de l'Hérault (C170).

Nous, De La Cour, capitaine au régiment de Chambonas, nous sommes allés avec un sergent et quatre soldats sur les six heures du matin [mot illisible sur la photocopie, probablement "dans" rayé] à la métairie de Jean Nicolas dit Janin située à la montagne de Lousère et près le bois de Faux des Armes lieu appelé Valmivers dépendant de notre inspection, et aurions trouvé dans ladite métairie la femme dudit Nicolas, et après avoir exactement fouillé avons trouvé entre le couvert et la muraille qui soutient les poutres dudit couvert et dans un des ais un petit sac où il y avait six livres de psaumes notés, et dans le même temps nous serions aperçus que la femme dudit Janin prenait un livre qui était sur un ais qui était dans la cheminée qu'elle cacha dans sa jupe, lequel lui aurions ôté par force nonobstant la résistance qu'elle faisait ledit livre, intitulé les actes des apôtres et épitres de St Paul St Mathieu et apocalipse de St Jean, au milieu duquel il y avait une paire de lunettes et au marge de la couverture il y a écrit : ce livre appartient à moi Pierre Malachane, ce qui nous aurait obligé de demander à la femme dudit Nicolas si elle ou son mari savait lire, et s'il se servait desd. lunettes, et à qui elles appartenaient aussi bien que lesd. livres ; laquelle aurait répondu que son mari ne savait pas lire, qu'elle lisait mais qu'elle ne se servait pas de lunettes, qu'elle ne savait pas à qui elles appartenaient aussi bien que lesd. livres. Lui aurions aussi demandé s'il n'était pas venu quelques étrangers ou des gens des lieux circonvoisins qui lui avaient baillé lesd. livres et venaient les lui lire. Elle aurait répondu que non ; nous aurions emporté lesd. livres au lieu de Gourdouse où nous sommes en quartier et aurions dressé le présent verbal le vingt-quatre septembre mil six cent quatre-vingt dix que nous avons signé et fait signer à notre sergent Delacour Durand sergent


Compléments: Il ne fait aucun doute pour nous que Nicolas dit Janin est Nicolas Joiny.
En effet, le lieu que nous avons transcris "Valmivers" doit être lu en fait Valinières ou habitait effectivement Joiny à l’époque (communication de Henry Mouysset dans le cadre de la préparation de son livre "Les premiers camisards" -à paraître).

Cette perquisition pourrait expliquer son engagement dans l'armée (pour échapper à l'emprisonnement et laisser passer les poursuites). Le fait qu'il habitait cette métairie expliquerait aussi qu'il connaissait le massif du Lozère et le bois de la Fau des armes comme sa poche. Quand à sa femme, on n'en entend plus parler par la suite, elle a pu être emprisonnée et décéder en prison (hypothèse pure !), ou bien s'enfuir.

Il y a aussi dans le même dossier C170, folio 73 une autre lettre, probablement du même Delacour (je ne l'ai pas photocopiée mais seulement recopié le passage suivant) : "... j'ai trouvé dans une métairie du nommé Jean Nicolas dit Jagnin, n. c., beaucoup de livres défendus, je croyais bien d'y trouver des armes cachées le lieu étant fort suspect, il n'y avait que la femme dudit Nicolas que je n'ai pas cru devoir arrêter, son mari s'est évadé, apparemment qu'il se sent coupable. Il a du bien à ce qu'on dit....".

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