Mémoire sur le camisard Jean BOULET

AD34, C188.70

Mémoire

Jean Boulet du lieu de St Césaire de Gauzignan a esté un des chefs des rebelles et des plus mauvais dès le commencement de la révolte avant l'affaire de Vagnas. Il s'est rendu le dix du mois d'octobre dernier et pris un billiet de pardon de Monsieur le Maréchal de Villars.

Dans le mois de novembre il sortit du royaume avec Jalaguier et Fidel autres chefs des rebelles, fut nourri à Nismes, reçut de l'argent et fut conduit sur une route jusques à Genève aux dépens du Roy.

Pendant son séjour dans cette ville il fit plusieurs voyages en divers lieux des environs dont on ne sait pas le détail du depuis, et dans le mois de décembre dernier, il est revenu en province, s'estant accompagné depuis Genève du nommé Mourgues de Lézan dont le père fut tué par les fanatiques, dragon dans le régiment de Lestrade de la compagnie de Mr de Boucairan lieutenant-Colonel, jusques à Villeneuve d'Avignon où il négocia un passage dans le Comtat pour lui et ceux qu'il devait mener, après quoy il partit pour Nismes.

D'où il est allé par son propre aveu entre St Césaire de Gauzignan et Vézénobre et y a resté quelques jours toujours dans le bois et à la campagne, n'ayant eu commerce qu'avec le nommé François du lieu de Vézénobre, berger de Mme de Calvière. Il est à propos de le faire arrester pour estre interrogé sur la réponse dudit Boulet, ce qui peut donner quelque éclaircissement sur l'assassinat du sieur Caüsel [pour Cahusac, curé blessé par des soldats qui en voulaient à son argent semble-t-il. Pendant quelques temps on crut à une agression de camisards].

Après ce séjour Boulet est revenu à Nismes, on ne sait point tout le manège qu'il y a fait, mais il est constant que les nommés Paul Barry, Henry Paul et Guibal charron dudit Nismes ont eu part à sa conduite.

Il parait clairement que le nommé Boulet était revenu en province avec plus d'un dessein, c'est un émissaire envoyé pour examiner l'estat des affaires, la disposition des peuples pour donner des nouvelles et rallumer le feu de la sédition, et c'est dans cette vue que l'assassinat du vicaire de Vezenobre a esté commis s'il est un des auteurs.

On ne peut du moins douter qu'il ne soit guide puisqu'il l'avoue par sa réponse.

Henry Paul a paru très dangereux et un espèce de prédicant très fanatique, sa fréquentation avec ledit Boulet est prouvée par sa réponse.

Les nommées Jeanne Roque femme d'Izaac Lapierre et Marie Roques sa soeur sont deux anciennes catholiques mais bien plus mauvaises que les plus insignes camisards. Leur dessein était d'aller à Genève ou à Lozane faire une abjuration publique de la religion catholique. Leur réponse est remplie de mensonges et opposée à celle de Boulet et de Pau qui avouent le commerce qu'ils ont eu ensemble, on ne voit qu'une mauvaise foi dans tout ce qu'elles ont dit.

Il y a des preuves que Jeanne Roque a payé le soupé pour les deux jeunes hommes qu'elle nie de connaître, que Marie sa soeur a esté au soupé et qu'ils ont couché dans la mesme chambre, ce qui marque la fausseté de leur réponses sur ces articles.

Il y a aussi des témoins que le nommé Boulet fut à Villeneuve il y a plus d'un mois pour conclure un marché de passage pour une quinzaine des gens suspects qui devaient sortir du royaume.

Comme aussi que le nommé Henry Pau donna de l'argent pour faire passer ledit Boulet et les deux femmes qui ont été arrêtés le six du présent mois de janvier.

Il parait nécessaire d'entendre le nommé Mourgues dragon de mr de Boucairan qui demeure à Lézan et qui a fait le voyage de Genève à Villeneuve avec ledit Boulet qui peut en savoir quelque particularité.

Le nommé Paul Barry ménager de la ville de Nismes demeurant à la Carreterie mérite d'estre incessamment arresté tant par le commerce qu'il a eu avec ledit Boulet que par les raisons expliquées dans la lettre qu'on a eu l'honneur d'escrire à Monsieur de Basville.

On peut tirer quelque éclaircissement du nommé Guibal de Nismes, charron de son mestier, beau-frère de Jeanne Roque qui a eu commerce avec lesdits Boulet et Pau.

Nota que Jeanne et Marie Roques doivent être interrogées sur leurs noms parce qu'il est marqué dans le certificat de mr de Varangle Conseiller du troisième du mois de janvier que Jeanne Roque est femme de Louis Jonquet, et Marie femme d'Izaac Lapierre, cependant Marie a nié dans sa réponse d'estre ni mariée ni fiancée.

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